samedi 8 mai 2010

At the airport

(message rédigé hier, at the airport justement)

C’est marrant, quand même, comme la vie nous fait des clins d’œil (Dieu ?). Il y a pile 10 ans, j’étais déjà loin de mes terres, déjà en Angleterre, déjà en train de passer un palier
important dans ma vie de jeune homme. Il y a 10 ans, déjà, j’étais là, posé à un même table dans un même aéroport (non, pas le même, mais un même, quand même), les yeux et les oreilles grandes ouvertes, à observer la vie autour de moi. A ressentir cet endroit. Vertige du monde et de sa mobilité incessante, vertige des émotions toutes rassemblées dans cet endroit, vertige de la vie, qui transpire partout dans ce lieu, dans tous ces visages.

Il y a dix ans, déjà, j’écrivais un article pour le journal de l’école à Bournemouth intitulé « at the airport ». Original, non ? Déjà, je ne pouvais m’empêcher de m’émerveiller devant tant de
choses qui s’y passent, tant d’émotions : la joie des retrouvailles, la tristesse des séparations,
la colère, l’impatience, le dépit pour les plus malchanceux, la réjouissance pour ceux qui partent en vacances par exemple, le soulagement pour ceux qui arrivent enfin à bon port. La peur de l’avion, la peur de l’inconnu, la peur de la mort. Tout y est. De A à Z. Un vrai résumé de la race humaine.

Car non seulement les émotions y sont présentes, mais aussi les générations et les ethnies s’y mélangent à qui mieux mieux dans un melting-pot humain gigantesque, les classes sociales aussi. C’est toujours drôle de voir un anglais bien bourru (pas encore bourré, mais en bonne voie),
écarlate du coup de soleil attrapé lors de ses vacances, cotoyer un homme d’affaires costard-cravatté, et son balai dans le cul. De voir le couple de « vieux mariés », comme dirait Sardou, cotoyer les enfants d’une classe allant en voyage d’études. Le bébé qui pleure, la jeune fille qui sourit dans les bras de son amoureux, les hommes d’affaire d’âge mûr, les retraités, toutes les générations s’y retrouvent.

Et cela pourra paraître étonnant, mais Dieu y est aussi présent. D’abord parce qu’on y trouve des salles de prière. Mais la présence Dieu se limite-elle au salles de prières ? Non, Dieu est présent dans chacun des sourires, dans chacunes des inquiétudes, dans chacun des moments de partage, dans chacune des espérances. Dieu est présent dans chacune des émotions ressenties, dans chacun des liens qui unissent les personnes. Etrangement, dans ce lieu supposé être seulement un lieu de passage, la vie fourmille, bourdonne, éclate au grand jour. Dieu est d’abord un Dieu de la vie, présent au cœur de nos vies, au cœur de nos émotions. Et il est là.

Alors cet aéroport, supposé n’être qu’une étape, est en fait une porte qui ouvre vers de nouveaux horizons, comme porté par Dieu. Un lien essentiel entre les gens d’ici et d’ailleurs, un trait d’union qui relie la race humaine. Car le voyage, la mobilité, sont d’abord des mises en relation. Et l’aéroport joue son rôle dans ce processus, profondément et intensément.

Alors ne regardez plus cet endroit avec un regard désabusé. Ce n’est pas un endroit comme un autre. Ouvrez grand les oreilles et les yeux, laissez votre bon roman ou journal pour l’avion, arrêtez de vous plaindre pour quelques minutes. Et ressentez la vie autour de vous, le savant mélange des hommes et des femmes de toute origine. Observez et goûtez à la race humaine, à sa transparente beauté et à sa dégoûtante opacité. Que ceux qui ont des yeux voient et que ceux qui ont des oreilles entendent, comme dirait l’autre. Car au détour d’un regard, au carrefour d’un sourire, au tournant d’une rencontre, vous pourriez bien, vous pourrriez bien, apercevoir… Dieu.

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